Microbiotes cutanés : nos alliés de taille !
Depuis quelques années, nous entendons de plus en plus parler du microbiote intestinal, vaginal ou encore des sols. Mais qu’en est-il des microbiotes cutanés ? Composés de micro-organismes, on en compte environ mille milliards à la surface de notre peau, soit dix fois le nombre d’étoiles présentes dans notre galaxie !
Écrit par : Aurore Bisserier
C’est un ensemble de micro-organismes qui vit dans une niche écologique, pour lequel il est adapté
Savez-vous qu’en ce moment même, des micro-organismes sont en train de se déplacer sur votre peau pour accomplir leurs tâches quotidiennes ?
Afin de mieux comprendre les microbiotes cutanés, commençons par définir ce qu’est le microbiote. « C’est un ensemble de micro-organismes qui vit dans une niche écologique, pour lequel il est adapté », définit Catherine Dunyach-Remy, docteure au CHU de Nîmes. Parmi ces micro-organismes, on retrouve des bactéries, des champignons, des virus, des archées et des acariens. Une diversité impressionnante ! Dans cet article, nous allons nous concentrer sur les micro-organismes les plus abondants : les bactéries.

Pourquoi des microbiotes cutanés au pluriel ?
Chaque région de la peau possède son propre microbiote. Par exemple, la composition de celui de la peau au niveau du buste sera très différente de celui situé au niveau des pieds. Cela s’explique par la nature de l’environnement : sur le buste, la peau est plus sèche et la production de sébum y est plus importante, alors que les pieds auront un environnement plutôt humide. Ces différences entraînent la prolifération de diverses niches bactériennes, composées d’espèces variées.
Ces bactéries cutanées peuvent aussi être retrouvées dans d’autres microbiotes comme le microbiote intestinal, car elles peuvent être aérobiques (elles ont besoin d’oxygène pour se multiplier) comme Corynebacterium xerosis, mais aussi anaérobiques (incapables de se multiplier en présence d’oxygène) comme Cutibacterium acnes (présentes dans les glandes des follicules pileux). Il existe également des espèces aéro-anaérobiques (qui peuvent se multiplier avec ou sans oxygène) comme certains staphylocoques.
À ce stade, vous vous demandez peut-être si les microbiotes cutanés sont les mêmes pour tout le monde et s’ils restent les mêmes tout au long de notre vie. Eh bien non ! En effet, ces microbiotes peuvent changer en fonction de l’environnement extérieur, notamment suivant l’exposition aux UV, l’humidité ou encore la température. Ils sont aussi influencés par les produits d’hygiène et cosmétiques utilisés, mais également par l’âge. Une étude a montré qu’à un certain âge, la prolifération d’acariens augmente, entraînant parfois la présence de rosacée (maladie cutanée provoquant des rougeurs chroniques).

Un bouclier pour notre peau
Les bactéries que nous retrouvons à la surface de notre peau sont comme des minuscules super-héros. Elles vont jouer le rôle de différentes barrières : physiologique, physique, chimique et immunologique.
Cela s’explique par le fait que les bactéries vont venir renforcer le revêtement cutané (protection face aux agressions externes), et
« interagir de bactérie à bactérie afin d’inhiber l’implantation de certains pathogènes », précise Catherine Dunyach-Remy. Ainsi, ces microbiotes participent à notre protection, en activant et en éduquant notre système immunitaire inné (première défense face aux pathogènes extérieurs) lorsqu’ils identifient des organismes jugés
« dangereux ». On peut citer par exemple Staphylocoque epidermidis, qui stimule le système immunitaire et entraîne une régénération de l’épiderme afin d’avoir une cicatrisation plus rapide.
Quelles solutions pour les personnes souffrant de problèmes cutanés ?
De plus en plus de personnes souffrent de problèmes d’eczéma, de rosacée, d’acné, etc., qui sont le plus souvent liés à un déséquilibre du microbiote cutané.
Alors comment rétablir l’équilibre de ces microbiotes ? Une solution identifiée, mais non systématique, est l’application de rayonnements UV, en cas d’apparition de plaques d’eczéma. Il a également été montré qu’en cas d’escarre (plaie causée par une pression prolongée sur une zone du corps), les microbiotes cutanés participent à la cicatrisation, mais lorsque la plaie reste ouverte longtemps, elle finit par abriter une grande diversité de bactéries externes, entraînant la création d’un biofilm (communauté multicellulaire de micro-organismes) qui complique la cicatrisation.
Actuellement, « beaucoup de pistes sont en phase de recherche », indique Catherine Dunyach-Remy. L’une des pistes principales repose sur l’utilisation de protéines anti-microbiennes qui peuvent inhiber la production de biofilm afin de rétablir un écosystème sain de la flore cutanée.
Les microbiotes cutanés sont les gardiens invisibles de notre peau. Mieux comprendre leur fonctionnement pourrait permettre une meilleure prévention afin de maintenir une flore stable et d’éviter les complications.