Mouvement

SALAMI, du fond des abysses aux étoiles

Samuel Marre

Quel peut être le point commun entre le fond des océans et la profondeur des sous-sols ? Une pression et des températures extrêmes, à telle point qu’elles rendent toute expérience difficilement observables. Un problème auquel a réussi à pallier Samuel Marre, chercheur à l’Institut de la matière condensée de Bordeaux.

Samuel Marre. Crédits : ICMCB

Un parcours international

« Bon alors, qu’est ce que tu veux savoir ? ». Dans son petit bureau encombré, Samuel m’accueille autour d’une table ronde complètement vide, une vision rare dans le bureau d’un chercheur en physico-chimie, surtout de cette trempe là : c’est que les locaux de l’Institut de la matière condensée de Bordeaux (ICMCB) ne sont pas étrangers à ses activités, qui ont assisté à un tournant phare de sa carrière et à l’accomplissement d’une invention qui va peut-être fracturer des recherches à plusieurs échelles. Pourtant, le chemin brillant du chercheur n’a pas toujours été tout tracé. « Au début de mes études, je voulais me diriger vers le commerce, raconte-t-il. Bon, c’était vraiment une chance que je ne sois pas parti dans cette voie-là parce que honnêtement, j’y aurais pas fait long feu. Il y a trop de requins, moi je suis toujours à l’ouest ». Ses études d’ingénieur le mènent à une thèse en science des matériaux et génie des procédés, à l’université de Bordeaux, puis il effectue une recherche post-doctorale au MIT, qu’il intègre « franchement sur un coup de bol monstrueux », pour reprendre l’exactitude de ses propos.

Le nom d’un projet, […] ça peut vraiment faire la différence pendant la sélection. Moi, mon truc, c’est les noms de bouffe.

Salami ou Bigmac ?

C’est une expérience ardue, mais valorisante. De retour en France, Samuel se dirige vers le CNRS en 2009 pour intégrer l’ICMCB, où il continue encore aujourd’hui de ruiner les noms de ses projets de recherche : « SALAMI, avant j’étais sur la recherche BIGMAC… Ça peut faire rire, mais le nom d’un projet, si il est moyen, peut vraiment faire la différence et le différencier des autres pendant la sélection. Moi, mon truc, c’est les noms de bouffe », plaisante-t-il.

La révolution sous pression

Mais l’œuvre de sa vie, en tout cas pour l’instant, tient dans la paume d’une main. Samuel me montre une petite plaque, incrustée de petits circuits. « C’est du saphire, explique-t-il, et les circuits à l’intérieur sont creux ; l’idée, c’est de mettre cette plaque soit sous pression, soit sous haute température, soit les deux, pour simuler un environnement extrême. Ensuite, on insère un liquide, un gaz ou un élément à étudier et on observe son comportement en temps réel. La différence, c’est que le saphire est transparent et permet de voir directement à l’intérieur du modèle pendant l’expérience : avant ça, aucun matériau transparent assez résistant n’avait été trouvé pour permettre ce genre de chose ».

Le modèle créé par Samuel permet une simulation poussée d’environnements inatteignables traditionnellement : fonds marins, profondeur terrestres mais aussi espaces, voire planètes extraterrestres. 

De la France aux Etats-Unis

Samuel parle de son directeur de thèse, François Cansell, qui lui a proposé d’intégrer un poste au CNRS, requérant une période de  post doctorat à l’étranger. C’est à partir de là que Samuel partira au MIT et découvrira la microfluidique, le sujet de son travail aujourd’hui.

Arthur Joubeaux

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